L’obligation de vigilance des banques : mise en lumière du délit de blanchiment
Dans un cas récent, un groupe de sociétés a été suspecté de mener une escroquerie de type « chaîne de Ponzi ». Cette fraude implique d’attirer des investisseurs dans un projet, non pas en les récompensant avec les bénéfices de leur investissement, mais avec l’argent apporté par ceux qui arrivent par la suite. Cette situation a été révélée dans un rapport qui a été remis au procureur de la République, dans lequel étaient décrits des mouvements financiers suspects sur les comptes des différentes entités du groupe.
La cour d’appel a erronément considéré que le simple défaut de la banque à respecter ses obligations de vigilance, telles que définies par les articles L. 561-5 à L. 561-10-2 du Code monétaire et financier, équivalait à une complicité dans l’opération de blanchiment des profits issus des infractions commises par son client. Cependant, la décision n’a pas été annulée sur ce point car l’utilisation d’un compte bancaire dans l’un de ses établissements et l’exécution d’ordres de virement d’argent vers des comptes à l’étranger, comme constaté dans le jugement, peuvent démontrer la participation de la banque à des opérations de blanchiment.
De plus, les juges ont déterminé, en se basant sur leur appréciation souveraine, que la banque ne pouvait ignorer l’origine frauduleuse des fonds présents sur les comptes de la société cliente, compte tenu des informations qu’elle avait sur le fonctionnement du compte en question. Ils ont donc conclu que l’élément moral du délit de blanchiment était présent.
En outre, la cour d’appel a noté que la banque et ses représentants, bien qu’ayant connaissance de la situation, n’avaient pas réalisé en temps voulu les déclarations de soupçon nécessaires. Par conséquent, elle a rejeté la cause d’irresponsabilité pénale prévue par l’article L. 561-22, IV, du Code monétaire et financier, qui accorde l’immunité pénale aux personnes qui ont signalé de bonne foi la situation conformément à l’article L.561-15 du même code.
Cependant, l’article 480-1 du Code de procédure pénale stipule que les personnes condamnées pour un même délit sont solidairement responsables. Cette solidarité s’applique également à ceux qui ont été reconnus coupables d’infractions connexes, sans que le juge puisse limiter les effets de cette solidarité en fonction du degré ou de la nature de leur participation personnelle.
La décision de la cour d’appel qui a limité la condamnation solidaire de la banque à l’indemnisation d’une partie du préjudice subi par certaines victimes est donc sujette à cassation. Après avoir constaté que la solidarité entre l’auteur de l’infraction principale et celui du délit de blanchiment n’était pas contestée, la cour a déclaré que la banque ne pouvait être tenue solidairement responsable qu’à hauteur des sommes que les victimes avaient réellement déposées sur le compte bancaire de leur société ouvert dans l’établissement poursuivi. De plus, selon la règle du prorata temporis, la solidarité de l’établissement bancaire avec les dirigeants d’entreprise serait réduite de 50 % sur les sommes que les victimes auraient prouvé avoir versées sur le compte du groupe de sociétés.
Références :
– Cass. crim., 19 juin 2024, n° 22-81808.
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