Reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires au sein de l’UE
Dans le cadre de la législation de l’Union européenne, les décisions de justice prises dans un État membre sont reconnues et applicables dans les autres États membres sans qu’il soit nécessaire de suivre une quelconque procédure. Cette disposition est définie dans le premier paragraphe de la convention de Bruxelles I.
La jurisprudence de l’article 1351 du Code civil stipule que le requérant doit dès le début de la procédure, exposer tous les arguments qu’il estime pertinents pour justifier sa demande (Cass. ass. plén., 7 juill. 2006, n° 04-10672).
Interprétation de la CJUE
Selon la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), l’article 33 du règlement de Bruxelles I, en conjonction avec l’article 36 du même règlement, stipule qu’une décision relative à un contrat de travail prise dans un État membre ne peut empêcher la présentation de nouvelles requêtes devant une juridiction d’un autre État membre. Cela est vrai même si la législation du premier État membre comprend une règle de concentration des demandes relatives au contrat de travail. Cette interprétation s’applique sans préjudice des règles procédurales de l’État membre requis qui pourraient s’appliquer une fois cette reconnaissance effectuée (CJUE, 8 juin 2023, n° C- 567/21).
Application des règles de procédure
Cela signifie que les juges du pays recevant la demande, après avoir reconnu la décision rendue dans un autre État membre, peuvent faire application de la règle de concentration des moyens, qui est une règle de procédure, en vigueur dans leur propre ordre juridique.
La règle prétorienne de concentration des moyens stipule qu’un requérant à une action en paiement doit dès le début de la procédure, présenter tous les arguments qu’il estime pertinents pour justifier sa demande. Il n’est pas autorisé à formuler ultérieurement la même demande contre les mêmes parties en invoquant un fondement juridique différent. Cependant, cette règle ne s’applique pas lorsque la première instance se déroule devant une juridiction étrangère. L’application de cette règle dans ce contexte pourrait en effet constituer une entrave excessive au droit d’accès à la justice, en raison de son manque de prévisibilité et d’accessibilité.
Une cour d’appel qui applique cette règle dans le cadre d’une fin de non-recevoir fondée sur l’autorité de la chose jugée viole ces principes. Par exemple, si une société luxembourgeoise qui poursuit un administrateur pour le paiement de sommes suite à des détournements d’actifs n’a pas invoqué la responsabilité contractuelle devant les juges luxembourgeois, elle ne peut être empêchée d’invoquer un fondement juridique différent de celui qu’elle a omis d’invoquer en temps voulu devant les juridictions luxembourgeoises.
Source :
– Cass. 1re civ., 19 juin 2024, n° 19-23298
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